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Félix Potin est connu comme étant l’inventeur du « contrat de confiance » dans la première épicerie qu’il ouvre à Paris en 1844. Il vend le sucre, l’huile et le café aux prix de fabrique pour fidéliser sa clientèle à long terme. Il se rattrape sur les produits de luxe et parie dès 1850 sur le chocolat, gourmandise phare qui devient emblématique de la maison Potin.

C’est donc dans les tablettes de chocolat que les gourmands trouvent des images qu’ils peuvent réunir dans des albums au format italien au titre évocateur : célébrités contemporaines. La publicité est explicite : « On trouve dans le chocolat Félix Potin, des photographies de célébrités dans tous les paquets de 500 grammes ». Même si les albums de portraits existent déjà, notamment avec les photographies au format timbre-poste de Justin Lallier pour les magasins du Printemps ou les portraits lithographiés des albums publicitaires de Mariani, les portraits mis en avant dans les albums Potin sont de véritables épreuves photographiques de studios et de photographes renommés comme Nadar, Boyer, Petit, Reutlinger ou Pirou.

L’album conservé aux Archives départementales appartenait à la famille de Charles Forot et il est presque complet. Sur les 510 portraits, il en manque neuf, essentiellement des souverains étrangers. Dans la partie supérieure des portraits, on note la mention « Collection Félix Potin ». Celle-ci indique que l’album est une deuxième version de la première collection et nous pouvons la dater d’entre 1899 et 1908, date à laquelle apparait la deuxième collection. Notons aussi que la couverture indique 510 célébrités, que la page de garde mentionne 500 célébrités, et que l’on dénombre en réalité 532 emplacements de portraits.

Chaque page recto de l’album présente 14 photographies (7,5 cm x 4 cm) classées de façon pédagogique en une quinzaine de catégories : présidents français, souverains étrangers et leur famille (de l'Abyssinie à la Turquie), hommes politiques français et européens, clergé français et international, personnalités issues des sphères de l'Armée et la Marine (France et alliés), de la magistrature et du barreau, des sciences tels des ingénieurs, des explorateurs, ou encore des médecins, hommes et femmes de lettres, musique, peinture, sculpture et architecture, artistes lyriques et dramatiques, sportifs (escrime et vélocipédie), Français et étrangers. Tous les portraits sont accompagnés en regard d’une petite biographie.

Ces images et albums étaient « gratuits » à la condition de manger 500 tablettes de chocolat ! Le succès a été immédiat et durable. La première collection a été tiré à 75 000 exemplaires (celui des Archives porte le numéro 67 000). La maison Félix Potin lance entre 1898 et 1922 trois collections de ces portraits. Un quatrième album est publié après la Seconde Guerre mondiale en 1952.

Véritable instantané de la vie politique, intellectuelle et religieuse des années 1900, cet album glorifie des centaines de célébrités maintenant oubliées pour la plupart. Il donne aussi à voir une société encore très masculine : sur les 510 portraits, seuls 37 sont féminins (30 artistes lyriques ou dramatiques, 3 femmes de lettres, 1 musicienne et 2 peintres).