Le changement d'heure

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Lors du changement d’heure, on entend souvent dans les médias que l’heure d’été a été instituée pour la première fois en 1976 suite au choc pétrolier. C’est en 1916 qu’il est expérimenté pour préparer les citoyens au changement. Mais en 1917 une loi « ayant pour objet d’avancer l’heure légale pendant la période d’été » autorise le gouvernement par décret pendant la durée de la guerre, à opérer cette manipulation entre le 1er dimanche de mars et le 1er dimanche d’octobre. Des affiches sont apposées dans toutes les mairies et lieux publics. Les motifs sont d’économiser pétrole, gaz, charbon et électricité dans un pays en guerre.

Mais déjà la controverse apparaît : « une mesure aussi grave qui jetterait un trouble général dans la vie nationale […] pour un bénéfice reposant sur des données incertaines », lit-on dans la presse. Fin 1917 il est temps de faire le bilan. Il y a les sceptiques tel le sous-préfet de Largentière qui juge les effets nuls, dans un arrondissement non desservi par le gaz et dont la population paysanne se lève et se couche avec le soleil. Le commissaire de Privas note que la ville n’étant ni industrielle ni commerciale, les commerces sont de toute façon fermés à 9 H le soir. Le sous-préfet de Tournon plus malin, parle de méthodologie pour enquêter et ne répond pas. Dans le clan des « pour » le commissaire d’Aubenas relève que la mesure oblige l’ouvrier à se lever tôt, et après le dur labeur à se coucher tôt, d’où une économie, même s’il peut être tenté d’aller au café après le travail au lieu de son jardin. Le président de la chambre de commerce relève les économies d’énergie faites. Lui aussi souligne que l’ouvrier peut vaquer plus longtemps à des « soins agricoles » ou à jouir de la vie de famille tout cela pour une bonne hygiène physique et mentale. Enfin le pragmatique ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, explique que les cantonniers ne travaillant qu’avec la lumière du jour, le changement d’heure n’a aucune influence sur les travaux.

Si l’arrêt des hostilités est bien le 11 novembre 1918, le système perdure jusqu’en 1940 où les Allemands mettent tout le monde d’accord en imposant « l’heure de Berlin ».

A la Libération, après une tentative de rétablissement, l’heure d’été est finalement abandonnée en 1945 et rétablie en 1976. Moralité : notre mémoire nous trahissant quelque peu, on a toujours besoin d’archives !