La « comète impériale » ou la plus célèbre comète du XIXe siècle

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Plusieurs sources dans les Archives ardéchoises mentionnent le passage de comètes mais la plus célèbre est sans contexte celle observée par Honoré Flaugergues. Né et mort à Viviers (1755-1830), il adresse en mars 1811 une lettre au préfet de l’Ardèche qui porte à la connaissance de tous, la découverte d’une comète : « Le 25 de ce mois, à 8 heures du soir, j’aperçus en parcourant le ciel avec ma lunette de nuit, une petite blancheur ronde et confuse à la poupe du navire Argo1. […] Le lendemain, je revis la même blancheur, mais environnée d’autres étoiles que la veille ; d’où je conclus que c’était une comète. »

Dans un autre courrier, daté du 1er juin 1811, Flaugergues se flatte que « l’astronomie a été heureuse qu’il y eut un observateur à Viviers, sa comète n’ayant été vue à Paris par les astronomes du bureau de longitude que d’après la lettre où j’avais l’honneur de leur annoncer la découverte, ils n’ont pas même pu parvenir à l’observer exactement ». Flaugergues note également l’importance de sa présence au bon moment « Il pouvait se faire que sans moi cette comète eut passé incognito ».

Pour Flaugergues cette comète serait celle observée au mois de septembre 1301, visible de toute l’Europe et en Chine. Mais, l’astronome prussien Bessel, fin 1811, démontre son précédent passage au règne de Ramsès II en Égypte.

Découverte par Flaugergues à l’aide de son télescope, la comète, visible neuf mois à l’œil nu et dix-sept mois avec des instruments, est observée des États-Unis au Japon en passant par la Russie, l’Afrique du Sud. Elle est étudiée pour la dernière fois par Vikenti Karlovitch Vichnevski, à New-Tscherkask, dans le Caucase, le 17 août 1812.

Aujourd’hui, nous savons que les caractéristiques de l’orbite calculées en 1811 ne sont pas exactes, la période de sa révolution étant précisément de 3 095, 39 ans. Le noyau de la comète d’un diamètre d’une quarantaine de kilomètres est l’un des plus grands avec celui de la comète de 1729, et est estimé à une centaine de kilomètres.

Cette comète de Flaugergues est connue sous le nom de « comète impériale », l’Aiglon, fils de Napoléon étant né le 20 mars 1811, cinq jours avant sa découverte. Le précédent passage de la comète remontant à Ramsès II, Napoléon y voit un trait d’union avec l’Égypte qui le fascine depuis son expédition de 1798, un passage de flambeau, voire un signal céleste pour lancer à l’été 1812 sa campagne de Russie qui se noie dans la Bérézina en plein hiver 1812.

L’impact de cette comète dépasse le cadre de l’astronomie. Coïncidant avec des vendanges mirifiques dès le 15 septembre 1811, des bouteilles au millésime somptueux sont estampillées « vin de la comète », de nombreuses références dans la littérature y font référence (Guerre et Paix de Tolstoï ou Les Mémoires d’outre-tombe de Chateaubriand), de nombreux objets la représentent (éventails, calendrier, cadran d’horloge, théière…).

Pour rendre hommage à Honoré Flaugergues et sa découverte, un cratère de la planète Mars de 245 kilomètres de diamètre lui est dédié en 1973 par l’Union astronomique internationale, l’astronome étant également un observateur assidu de la planète Mars.

 

Pour en savoir plus sur cette histoire, voir l'article de Marion Wieber, La « comète impériale » ou la plus célèbre comète du XIXe siècle, in Un début à tout. Les premières fois qui ont fait l’Ardèche, Archives départementales, collection Adèche patrimoine, à paraître.



1Navire Argo est une immense constellation qui est subdivisée en trois portions en 1752 à cause de sa taille et son étendue. Puis ces trois sections deviennent à leur tour trois constellations distinctes : la Carène, la Poupe et les Voiles qui sont aujourd’hui incluses dans la liste des 88 constellations modernes de l’Union Astronomique Internationale en 1930.