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En cette année 2020, le Général de Gaulle est célébré à travers trois anniversaires, le 130ème anniversaire de sa naissance, le 80ème anniversaire de l’appel du 18 juin, et le 50ème anniversaire de sa disparition. Cette « année de Gaulle » est l’occasion de célébrer l’esprit de Résistance, l’esprit de la République et l’esprit de la Nation incarnés par la figure du Général.
Une autre résistance s'est incarnée le 10 juillet 1940 dans la salle de théâtre du casino de Vichy. Le Sénat et la Chambre des députés sont réunis en Assemblée nationale pour voter les pleins pouvoirs constitutionnels au maréchal Pétain afin de promulguer une nouvelle constitution de l’État français.
Le 16 juin en pleine débâcle, Paul Reynaud président du Conseil des ministres, qui a fait entrer le général de Gaulle dans le gouvernement pour insuffler l'esprit de résistance début juin, démissionne face aux divisions de son gouvernement. Le maréchal Pétain qui prône l'arrêt des combats, est nommé président du Conseil des ministres. Dès le lendemain, il appelle à cesser le combat et demande les conditions de l'armistice qui sera signé le 22 juin. Le 18 juin, le général de Gaulle qui a quitté le gouvernement, lance son appel depuis Londres.
Mais tout espoir n’est pas perdu. A Bordeaux, le gouvernement et le parlement décident de se soustraire aux Allemands en se repliant à Alger avec le vice-président du Conseil Camille Chautemps, le maréchal Pétain restant en France.
C'est alors que Pierre Laval, homme politique influent de la IIIème République et rompu aux manœuvres politiciennes, entre en scène. Il est nommé vice-président du Conseil le 23 juin. En quelques jours, par des pressions, des menaces exercées sur des parlementaires et des ministres abasourdis par la défaite, il fait échouer le projet de départ à Alger. Il convainc le maréchal Pétain de mettre fin au régime parlementaire de la IIIème République pour établir un état autoritaire. L’État français ou le gouvernement de Vichy, ville où s’établit le nouveau régime, n'est pas venu de nulle part. Il a mûri tout au long des années 30 dans les milieux parlementaires de la droite et de l’extrême-droite, dont les idées ont été exacerbées par la victoire du Front populaire de 1936.
C'est sous la menace des hommes de Laval, dans un climat de tensions extrêmes et de rumeurs de coup d’Etat et de l'envahissement de la zone libre par les troupes d’occupation, que le vote est acquis par 569 voix contre 80 et 20 abstentions. 27 parlementaires qui avaient pris place à bord du Massilia pour rejoindre Alger, ne peuvent pas prendre part au vote, de même que les élus communistes déchus de leur mandat depuis la signature du pacte germano-soviétique.
Dès le lendemain le maréchal Pétain promulgue des actes constitutionnels qui lui permettent, en sa qualité de chef de l’Etat de cumuler les pouvoirs législatif et exécutif. Les assemblées parlementaires, ainsi que les conseils généraux sont suspendus. Les outils juridiques suivront rapidement pour mettre en place l’Etat français et son régime autoritaire. Rapidement, menaces et répression s'abattent sur les opposants au nouveau régime.
Sur les quatre-vingts élus opposés à la disparition du régime républicain, deux parlementaires sont ardéchois sur les huit que compte le département, trois sénateurs et cinq députés.
Le député socialiste, Édouard Froment et le sénateur radical Marcel Astier.
Photos des deux parlementaires, Archives départementales de l'Ardèche, BIB-8 BR 545.
Édouard Froment, né en 1884 à Largentière, fils de paysan, agent général d’assurance, ancien combattant, se lance en politique en 1919 aux législatives sans succès pour la SFIO (ancêtre du parti socialiste). Mais à partir de 1925, il entame une carrière d'élu local, de conseiller général et de député en 1932. Dès fin 1940, il s'attache à restaurer clandestinement le parti socialiste, participe aux premières réunions qui vont jeter les bases de la résistance ardéchoise. Ses activités clandestines l’obligent à partir à Alger où il rejoint le général de Gaulle et siège à l’Assemblée consultative provisoire. Réélu député en 1945, il cesse toute activité politique en 1958 comme conseiller général de Thueyts. Il a été président du Conseil général en 1946 et 1948. Il décède en 1973.
Marcel Asitier, né en 1885 à Privas, est docteur en médecine et licencié en droit. Il est exploitant viticole et milite dans le syndicalisme agricole. Elu local, il est député radical en 1924 sous le Cartel des gauches et sénateur en 1938. Le 10 juillet, alors que Pierre Laval prend une dernière fois la parole devant l’Assemblée nationale pour remercier les parlementaires, Marcel Astier lance cette parole célèbre : « Vive la République quand même ! » comme en atteste le procès-verbal des débats établi sur le champ.
Extrait du compte rendu des débats de l'Assemblée nationale, séance du 10 juillet 1940.
Comme Edouard Froment, Marcel Astier s’active à la reconstitution du parti radical, héberge clandestinement des juifs, des étrangers et des résistants, des personnalités pourchassées.
Lui aussi menacé d’arrestation, il rejoint le général de Gaulle en 1943 et siège à l’Assemblée consultative provisoire. Réélu député en 1945 et conseiller général, il est le premier président du Conseil général après la Libération. Il meurt en 1947 à son domicile à Soyons.
Le général de Gaulle dénomma ces quatre-vingts parlementaires « les premiers résistants ».